« Inévitable, le conflit, nous ne sommes pas des Bisounours ! »

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27 mai 2013 – Les Echos. Page 38.

LA CHRONIQUE de Éléna Fourès,

Une dose de conflit est-elle vraiment nécessaire ? Ceux qui ne jurent que par l’adrénaline vantent ses vertus salutaires pour maintenir la combativité de troupes. Pour eux, le conflit, en tant qu’opposition des intérêts des personnes, «maintient en forme». Après tout, les animaux en captivité, nourris, soignés, vivent moins longtemps que les animaux sauvages exposés aux prédateurs.

D’autres estiment que, pour stimuler l’intelligence et l’agilité collectives, seule la confrontation est nécessaire, mais pas le conflit qui devient vite stérile, débouche sur l’agressivité, la violence et mène à la frustration et à la rancune.

Les acteurs de l’entreprise, femmes et hommes, sont sélectionnés par leurs capacités à se battre et à gagner. Mais il arrive trop souvent qu’ils se trompent de cible et de combat, et commencent à se battre entre eux au lieu de combattre ensemble leurs concurrents. En absence de leader porteur de sens, qui aligne les gens et fédère vers l’objectif commun, cela se produit fréquemment. Il suffit que deux chefs d’équipe s’opposent et entrent en conflit pour que leurs équipes suivent aussitôt. Si la guerre est un conflit armé, la guéguerre des services est une saga stérile, pompant l’énergie et le sens collectif. Quand, dans une banque, deux patrons se sont opposés violemment, leurs équipes se sont senties obligées de «cascader » ce conflit vers le bas. Les services n’ont plus collaboré, les sujets urgents restaient en attente, les clients se plaignaient, les résultats se sont détériorés.

Bac à sable pour adultes

Le mode de management y est pour beaucoup. Pour relever un défi, il faut se mobiliser, créer de l’énergie. Dans le mode affectif de management, on « carbure » par les conflits, on se mobilise en mode « les uns contre les autres ». C’est le mode opératoire binaire des enfants, fait des « bons » et des «méchants ». Ces jeux à somme nulle fleurissent dans le monde de l’entreprise transformé en un bac à sable pour adultes.

Le conflit est surtout un signe que le vrai leader est absent. La devise « il faut diviser pour régner » est l’apanage de petits chefs. Le vrai leader fédère au lieu de diviser. Tandis que le conflit profite aux petits chefs, il nuit à l’entreprise et fait souffrir ceux qui le subissent.

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