La chronique d’Éléna et Diane Fourès, experts en leadership et multi culturalité, fondatrice et dirigeante du cabinet IDEM PER IDEM.
« L’autorité doit aller de pair avec la responsabilité. » James O. McKinsey.
À notre époque, la relation personnelle est grandement valorisée. Il en découle une remise en cause de l’exercice de l’autorité, associé à la rigidité et à la violence d’un modèle désuet. Mais est-ce bien justifié ?
En réalité, la notion d’autorité est amalgamée avec l’autoritarisme, c’est-à-dire l’imposition de sa volonté par la force et la négation d’autrui. Or, ces deux concepts sont aussi proches l’un de l’autre que l’immobilité l’est de l’immobilisme.
Le mot « autorité » provient du latin « auctoritas », que Cicéron oppose au concept de « potestas » (pouvoir, force). « Potestas in populo, auctoritas in senatu » : les Anciens siègent au Sénat et possèdent la légitimité et la sagesse, ils n’ont aucun pouvoir exécutif. L’autoritarisme est par définition un mode d’exercice du pouvoir (potestas). Il est donc distinct et même opposé au concept d’autorité, associé, lui, à la légitimité et au respect.
Allons plus loin : « auctoritas » a pour origines étymologiques le verbe « augeo » d’une part – qui signifie créer, faire naître – et le mot « auctor » de l’autre – qui signifie auteur, fondateur, garant. La responsabilité et la créativité sont des caractéristiques essentielles de l’autorité.
« La compétence sans autorité est aussi impuissante que l’autorité sans compétence. » Gustave Le Bon.
La culture française, hautement empreinte d’expertise, amalgame souvent à tort le degré d’autorité et celui de compétence : plus on a de savoir-faire, plus on est respecté et reconnu comme légitime. Sauf que ce n’est pas la quantité d’expertise ou d’expérience brute qui détermine l’autorité, mais bien la projection d’un haut degré de maîtrise. C’est donc dans le rapport à l’autre, le savoir-être, que se jauge l’autorité, plus que dans le savoir-faire.
Pour conclure, avoir de l’autorité n’est pas lié au degré de connaissance, ni au grade hiérarchique, ni à l’exercice du pouvoir. C’est la capacité à structurer sa relation à l’interlocuteur, à créer le respect en projetant la légitimité et en incarnant la responsabilité. En fait, c’est établir le meilleur rapport proximité/respect en fonction de l’interlocuteur et du contexte.
Dans notre volonté collective de remettre l’individu et la relation au centre des préoccupations, nous avons développé une hypersensibilité aux regards et opinions extérieures. Nous sommes focalisés sur le besoin d’être appréciés, au détriment de l’établissement d’un rapport professionnel juste, ayant le respect pour moteur principal. Il est urgent de remettre l’autorité au goût du jour en incarnant ce savoir-être dans ses trois dimensions fondamentales : Responsabilité – incarner la Fonction, focaliser sur le factuel –, Adaptabilité – au contexte, à l’interlocuteur –, Clarté – poser des limites, donner le sens.
« Un peuple sans autorité ni pouvoir est un peuple sans respect. » Marcus Garvey.
À FAIRE
Prendre ses responsabilités
Positionnez-vous ainsi que vos interlocuteurs sur le territoire de la Fonction : rappelez-vos rôles et périmètres respectifs, restez factuels. Préférez le « je » stratégique au « nous » ou au « on », en l’utilisant lorsque vous exprimez vos convictions, vos décisions et vos résultats.
Rester souple
Votre curseur « relation » doit avoir au moins 3 positions : dissocié, neutre, proche. Le contexte, l’objectif et l’interlocuteur vous dicteront où le placer. Si vous êtes émotif/ve, commencez vos interactions en position neutre voire dissociée avant de glisser doucement vers le mode proche. Le partage de votre côté Personne doit être un privilège, pas un dû.
Poser les limites
L’autorité est la garante des règles du jeu. Clarifiez les limites à ne pas dépasser et veillez à ce qu’elles soient respectées, car cela conditionnera en retour le respect qu’on vous témoignera.
A EVITER
Chercher à plaire
Votre objectif en tant que Fonction est d’être respecté. Être apprécié (objectif de Personne) est un bonus, pas une fin en soi. La bonne distance est celle qui vous permet de faire un feedback négatif ou un recadrage efficace (dénué d’émotion) sans vous coûter ou vous faire peur.
Avoir peur du changement
Changer ses habitudes de fonctionnement peut faire peur : « quel impact ça va avoir sur mes relations professionnelles existantes ? », « Qu’est-ce qu’on va penser de moi ? ». Plus vous avez de modes, plus vous êtes riche. Préparez et cadrez ces changements comme vos nouvelles règles du jeu.
Être laxiste
C’est l’opposé de l’autorité. Vous serez apprécié, mais nullement respecté : on finira par vous marcher dessus, car on associera votre attitude avec un manque de respect de vous-même. Nul besoin d’être grandiloquent : recadrez simplement et fermement et faites respecter les règles, factuellement.