Le leader, « marchand d’espérance »

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La chronique d’Éléna Fourès, expert en leadership et multiculturalité, fondatrice du cabinet IDEM PER IDEM.
elena.foures@idem-per-idem.com

Le monde de l’entreprise souffre actuellement d’une crise identitaire profonde, suite à la perte de l’espérance. Elle est le sentiment de confiance en l’avenir, qui porte à attendre sereinement la réalisation de ses rêves. C’est pourquoi l’engouement est tel pour des leaders inspirants, comme Steve Jobs, qui sont capables de l’insuffler et de susciter un élan constructif collectif.

La vision pessimiste ambiante, alimentée par la déferlante de mauvaises nouvelles et de pronostics catastrophes, est destructrice car elle tue l’espérance dans l’œuf, et de ce fait prive les acteurs de l’entreprise de l’énergie nécessaire pour rêver l’innovation. Lorsque l’armée n’a plus d’espérance, la guerre est perdue, lorsque le peuple perd confiance, le régime politique tombe.

Aujourd’hui la peur, la méfiance, le découragement – tout le contraire de l’espérance – règnent partout. Le pessimisme collectif devient viral : plus les nouvelles sont affreuses et toxiques, plus elles se propagent. Le succès de plusieurs livres et films dépeignant une dystopie*, en est le triste reflet. Dans ce contexte, créer et nourrir l’espérance est le seul moyen de mobiliser durablement et de manière positive les équipes. « Il est indispensable d’espérer pour entreprendre » selon la célèbre maxime.

Ainsi, le leader inspirant est d’abord visionnaire : il a la vision d’un avenir meilleur :« I have a dream ». Napoléon Bonaparte avait bien compris cela lorsqu’il disait « On ne conduit un peuple qu’en lui montrant un avenir ; un chef est un marchand d’espérance. ». Alors naît l’espérance, qui est un sentiment d’attente sereine d’un avenir meilleur, donc un mélange d’espoir et de confiance.

L’espérance est le carburant indispensable à la réalisation des choses innovantes, à la construction de l’avenir. D’ailleurs, le terme utilisé par Napoléon, « marchand d’espérance », signifie qu’il ne suffit pas d’être simplement porteur d’une vision ; le leader doit encore la « vendre » pour que les gens y croient, y adhèrent, l’intègrent, bref, « l’achètent ». Et pour convaincre les autres, il faut d’abord être convaincu(e) soi-même : pour que les équipes vous fassent confiance, il faut la leur donner, comme un crédit.

1* Dystopie : Société imaginaire régie par un pouvoir totalitaire ou une idéologie néfaste, telle que la conçoit un auteur donné.
2* Citation de G.K. Chesterton

A FAIRE
1//  Se re-câbler pour voir les choses positives
Fixez votre attention sur les aspects positifs, en gardant en tête que même les échecs ont une valeur d’apprentissage énorme, sachez les valoriser !

2// Partager votre espérance = impacter 
Le leader croit que c’est possible, c’est essentiel. La question du « comment ? » ne vient que dans un deuxième temps. Ainsi une anecdote de la guerre froide raconte comment des scientifiques russes et américains, auxquels on a fait croire que la partie adverse avait trouvé une solution à un problème jugé insoluble, sont effectivement arrivés au résultat en un temps record !

3//  Etre constant
C’est la constance de sa confiance, de sa foi qui est importante pour le leader inspirant. Le plus difficile est de maintenir l’espérance face aux obstacles et à l’atmosphère défaitiste ambiante. Ceux qui y arrivent rentrent dans un cercle vertueux de réussite. Après tout « Les hommes donnent leur confiance à un grand homme car ils n’ont pas confiance en eux-mêmes. »

A EVITER
1//  Jouer du négatif
Le négatif étant la coquetterie de la langue française « Je ne dirais pas que c’est sans conséquences », ce qui stupéfie d’ailleurs les étrangers, celle-ci nous habitue à penser de même et à donner à nos idées une forme négative.
La facture sémantique est lourde : « ne pas être malade », n’est pas aussi enthousiasmant que « rester en bonne santé ».

2// Avoir peur de passer pour crédule
Avoir de l’espérance n’est pas croire au Père Noël. Ne vous laissez pas embrigader par l’atmosphère ambiante qui amalgame réalisme et pessimisme. Après tout, l’état de sommeil sans rêve, c’est la mort.

3// Hésiter et douter
Toute manifestation d’hésitation ou de doute détruit ipso facto l’espérance : un scénario négatif projeté ternit le scénario positif et détruit la confiance. C’est un cercle vicieux. Attention, s’il est permis de douter, dans une certaine mesure, des moyens mis en œuvre pour réaliser votre vision, votre adhésion à cette dernière doit, par contre, être inébranlable.

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